Entretien

4 min

Rencontre avec Sarah Zitouni : ses conseils pour surmonter le syndrome de l’imposteur

Votre petite voix intérieure vous joue des tours ? Vous doutez de vos décisions et de votre légitimité ? Ne seriez-vous pas tiraillée par ce qu’on appelle le syndrome de l’imposteur ? Lié à une éducation genrée, il affecte plus les femmes que les hommes et ce, dès le plus jeune âge : 75% des femmes disent en avoir souffert à un moment dans leur carrière. Toutefois, il est possible de s’en libérer. Sarah Zitouni, stratège d’entreprise et coach à l’origine de la méthode PowHER ta carrière, accompagne les femmes dans leur vie professionnelle et y a consacré un livre : « Tout vouloir, tout avoir », sorti en 2021 (Kiwi). Rencontre avec cette auteure bien décidée à faire bouger les choses. 

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question

Le syndrome de l'imposteur...

Qu’est-ce que c’est ?

Selon Sarah Zitouni, « cela recouvre toutes les pensées et biais mentaux qui viennent vous dénigrer et valoriser les autres. C’est lorsque vous vous dites : « je réussis par chance mais j’échoue à cause de moi ». C’est avoir l’impression que tout le monde a l’air de savoir ce qu’il fait à part vous, avoir le sentiment de bricoler et que les gens finiront par s’en rendre compte. »

Pourquoi vous intéressez-vous spécifiquement au syndrome de l’imposteur chez les femmes ?

Sarah Zitouni : Des études ont montré que ce syndrome touche plus les femmes que les hommes, il faudrait donc peut-être parler de « syndrome de l’imposteur au féminin » ou même de « l’impostrice ». Notamment parce que la socialisation et l’éducation des filles, en général, est très différente sur des points qui seront cruciaux dans le monde du travail. Par exemple, on dit aux petites filles qu’elles sont jolies, sages, calmes : en somme des qualités essentiellement passives. Et aux petits garçons qu’ils sont forts, intelligents et courageux, ce qui a trait à des caractéristiques actives d’une personnalité. Nous cherchons à prémunir en permanence les filles contre la prise de risque. Par la suite, cela peut leur donner l’impression qu’elles n’entreprennent jamais rien ou qu’elles ne le font pas assez bien. J’ai rencontré de nombreuses femmes qui reconnaissent la réussite chez les autres, mais pas chez elles. C’est ce qui m’a donné l’envie de traiter le syndrome de l’imposteur au féminin.

Au travail, comment ce syndrome se manifeste-t-il concrètement ?

S.Z. : Les femmes ont souvent le réflexe d’attendre du travail ce qu’elles attendaient de l’école : une bonne note, une reconnaissance, une récompense externe pour la qualité de leur travail. Mais, et je le déplore, le monde du travail ne fonctionne pas comme ça. Rien n’y est offert à ceux qui ne se mettent pas en avant. Il faut donc être capable d’assurer son « autopromotion », de mettre en valeur ce qu’on fait, d’en être fière. L’écueil numéro 1 : travailler de manière acharnée en silence. Cela peut conduire à s’épuiser, sans obtenir de reconnaissance et au bout du compte déboucher sur un burnout (un épuisement physique et psychologique).

Quels conseils donneriez à ceux – et surtout celles – dont ce syndrome freine la carrière ?

 S.Z. : Mon premier conseil : identifier et traiter le syndrome de l’imposteur. Soyez attentives à l’incohérence de vos pensées. Si vous vous dites « tu es une mauvaise mère parce que tu passes ton temps au bureau » et dans la seconde d’après « c’est parce que tu ne t’investis pas assez au travail que tu n’as pas eu la promotion », vous êtes en pleine crise du syndrome de l’imposteur.  Pour lutter contre, vous pouvez tenir une liste de tous vos accomplissements. Quand vous êtes devant votre feuille blanche et que des exemples vous viennent en tête, posez-vous la question « Aurais-je félicité une amie pour ça ? Serais-je fière de ma sœur si elle avait réussi ce projet ? ». Si la réponse est oui, alors notez-le ! Il faut savoir se traiter en amie, faire preuve d’empathie envers soi-même.

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Aujourd’hui, vous vous en dites libérée. Comment l’avez-vous surmonté ?

S.Z. : Le premier (grand) pas est de dire face au syndrome de l’imposteur « ce que tu me dis ne m’intéresse pas ». Je ne peux pas promettre aux gens d’arrêter de ressentir des émotions négatives, cela fait partie de la vie. Mais je peux leur promettre qu’il existe des moyens pour que cela ne gâche pas leur existence. Mon propre syndrome de l’imposteur a commencé quand j’ai touché du doigt mon rêve professionnel dans l’automobile. J’ai immédiatement pensé « c’est le casse du siècle, tout le monde va s’en rendre compte et on va me demander de partir ». Avec du temps, j’ai réussi à dépasser tout ça. Ce syndrome prend sa source dans l’éducation et peut donc être déconstruit. Je suis une jeune femme, issue de l’immigration, venant d’un milieu populaire et travaillant dans le secteur automobile, un secteur très masculin. J’ai eu peu de modèles féminins. Autant vous dire que j’ai fait office de licorne, ce qui peut faire exploser le syndrome de l’imposteur. Mon message à toutes les autres licornes c’est de dire « vous êtes rares et merveilleuses, votre différence est votre force ».

Il faut arrêter de gâcher le talent féminin, de risque de passer à côté de la prochaine grande figure féminine qui pourrait changer la donne.

Sarah Zitouni,

Pourquoi avoir décidé d’écrire un livre à ce sujet ?

S.Z. : Je tiens à ce que les femmes aient tous les outils à disposition pour pouvoir pleinement s’épanouir. La société est confrontée à de grands enjeux sociétaux et environnementaux que nous ne pourrons pas régler en nous passant de l’intelligence de 51% de la population. Il faut arrêter de gâcher le talent féminin, de risquer de passer à côté de la prochaine grande figure féminine qui pourrait changer la donne. Si je peux apporter ma pierre à l’édifice pour permettre aux femmes de prendre la place qui leur revient, de leur faire gagner du temps grâce à ma propre expérience, alors j’aurai atteint mon but.

Découvre le livre de Sarah Zitouni : « Tout vouloir, tout avoir », sorti en 2021, aux éditions Kiwi

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